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Extrait :
Nous ne nous tenons jamais au temps présent. Nous anticipons l’avenir comme trop lent à venir, comme pour hâter son cours, ou nous rappelons le passé pour l’arrêter comme trop prompt, si imprudents que nous errons dans les temps qui ne sont point nôtres et ne pensons point au seul qui nous appartient, et si vains que nous songeons à ceux qui ne sont rien, et échappons sans réflexion le seul qui subsiste. C’est que le présent d’ordinaire nous blesse. Nous le cachons à notre vue parce qu’il nous afflige, et s’il nous est agréable nous regrettons de le voir échapper. Nous tâchons de le soutenir par l’avenir et pensons à disposer les choses qui ne sont pas en notre puissance pour un temps où nous n’avons aucune assurance d’arriver.
Que chacun examine ses pensées, il les trouvera toutes occupées au passé ou à l’avenir. Nous ne pensons presque point au présent, et si nous y pensons, ce n’est que pour en prendre la lumière pour disposer de l’avenir. Le présent n’est jamais notre fin. Le passé et le présent sont nos moyens, le seul avenir est notre fin. Ainsi nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre, et nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais.
Blaise PASCAL, Pensées, Fragment Vanité n° 33 / 38, édition électronique, établie par G. Descotes, G. Proust, 2011.
Questions :
1. Incapable de se tenir en repos dans l'espace, l'homme l'est tout autant de se tenir dans le présent. Expliquez l'importance du verbe dans la formule "[n]ous ne nous tenons jamais au temps présent".
2. Cette incapacité à se tenir au présent se manifeste par une anticipation de l'avenir, ou le souvenir du passé. Comment sont-ils alors, l'un et l'autre, caractérisés ? N'est-il pas paradoxal, alors que nous pourrions nous tenir au présent, de sans cesse vivre dans la mémoire ou dans l'anticipation, tout en reprochant finalement au passé comme à l'avenir, de ne pas être présents ?
3. Rapprochez cette analyse de celle selon laquelle l'homme est un point au milieu de deux infinis : que remarquez-vous ?
4. Analysez la manière dont Pascal affirme que le présent est notre unique temps, quand passé et avenir n'ont aucune consistance.
5. Pourquoi, dans ce cas, fuir le présent ? Expliquez les deux raisons, diamétralement opposées, qui conduisent cependant au même fait.
6. Est-il raisonnable de chercher à se consoler de cela, en cherchant à "soutenir", c'est-à-dire prolonger dans l’avenir quelque chose d'agréable mais que nous craignons de voir disparaître ? En quoi est-ce à la fois manquer de le vivre au présent, et courir le grand risque de le manquer aussi à l'avenir ?
7. Quel effet produit, sur le lecteur, l'invocation "[q]ue chacun examine ses pensées" ? S'agit-il ici simplement de développer une analyse théorique des conduites des hommes ?
8. Expliquez en quoi toujours faire de l'avenir notre fin, et de notre présent (ainsi que de notre passé) un simple moyen d'y parvenir, conduit à ce que "nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre, et nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais".
9. Quelle hypothèse pouvez-vous formuler concernant ce qui est le temps du bonheur ? S'il s'agit du présent, pourquoi, et comment y aurait-il à travailler pour parvenir à s'y installer ?
10. Réfléchissez plus avant à la précédente question : le présent de l'être humain, s'il s'y tient, n'est-il pas un présent misérable, qui le renvoie à sa condition ? Voyez-vous, alors, une issue ?
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